Rentrée 2018 des personnels de direction académie de Nice

Déclaration liminaire du Sgen-CFDT à l'occasion de la rentrée 2018 des personnels de direction académie de Nice

Monsieur le recteur, messieurs les inspecteurs généraux, mesdames et messieurs les inspecteurs d’académies, chers collègues,

Si nous sommes réunis ce jour pour nous souhaiter mutuellement une bonne rentrée 2018, celle–ci n’est plus marquée par le mécontentement mais par un profond désarroi des personnels et une perte de confiance.

Une politique de rupture et de standardisation

Le 30 septembre 2017, le ministre de ’Éducation nationale, JM Blanquer, déclarait « en arrivant j’ai dit que je ne ferai pas une nouvelle loi, j’ai dit aussi que je ne changerai pas abruptement les programmes parce que je pense qu’il doit y avoir une sagesse dans la continuité des ministres de l’Éducation nationale… La solution ne viendra pas d’une loi miracle, la solution ne viendra pas d’une baguette magique, elle viendra d’un ensemble de mesures et d’un climat qu’on aura su créer. »

« La confiance, c’est ce qui caractérise les sociétés qui vont bien… Les écoles qui vont bien sont des écoles de la confiance. » (J M Blanquer)

Pour la confiance, nous sommes entrés dans une politique de standardisation. Il ne s’agit pas de faire confiance aux professionnels que nous sommes pour prendre des décisions et construire des politiques locales en fonction des situations auxquelles nous sommes confrontés, il est question de modélisations (s’appuyant souvent sur la science, notamment la recherche médicale) : les enseignants se voient prescrire des actes professionnels et les corps d’encadrement sont chargés de leur mise en œuvre et de leur vérification. Tout ceci s’exerce dans la précipitation où médias et usagers ont des informations avant nous. Nous regrettons que les consultations nationales sur les changements en cours ne débouchent, bien souvent, que sur une écoute bien polie mais que ne nous ne soyons pas entendus.

Nous attendions de la stabilité et de l’autonomie ainsi que nous l’avait annoncé le ministre, nous sommes de fait, submergés par les prescriptions. A ce titre, Parcoursup est le stéréotype du logiciel qui veille sur nous chaque matin et qui prétend organiser nos temps de repos. Il semblerait que la première qualité attendue d’un cadre pour notre ministre soit l’obéissance et non l’initiative.

Listons maintenant les exemples les plus saillants des décisions ministérielles avec lesquelles nous avons été le plus souvent en opposition pour le second degré.

DNB. Une simplification soi-disant… La seule bonne mesure était sa suppression pour donner sens à la validation du socle à la fin de la scolarité obligatoire. Le Sgen-CFDT a été la seule organisation à exprimer ce point de vue au ministre. Quant à la dernière réforme du collège, détricotée mesure après mesure, quel désarroi pour les personnels de direction qui avaient encore une fois dû s’investir à 120% pour surmonter les oppositions et construire des projets viables. Quelle crédibilité pour eux au sein de la communauté éducative, alors que leur loyauté à l’Institution avait été totale ? L’ironique « on vous l’avait bien dit madame la principale » asséné par les représentants des personnels de l’EPLE, est parfois difficile à digérer.

Devoirs faits. Quelle belle annonce pour le grand public !  Une fois de plus, il a été demandé aux personnels de Direction d’appliquer cette mesure dans l’urgence. Les élèves peuvent faire leurs devoirs au collège sans se poser la question du travail scolaire. Oubliant que l’accompagnement éducatif fonctionnait dans de nombreux collèges, que seulement 20% des collégiens sont concernés…

Réforme du bac et du lycée : une belle ambition partagée de simplification, de prise en compte du contrôle continu, de préparation à l’enseignement supérieur.  Au bout du compte, organisation délirante qui va transformer l’année scolaire en une succession d’examens dont l’organisation sera le quotidien des personnels de direction (que les personnels de direction vont devoir organiser). Le Sgen-CFDT a été la seule organisation syndicale représentant les personnels de direction à exprimer son opposition à une réforme technique qui va considérablement augmenter les charges de travail administratif des proviseurs et proviseurs-adjoints.

Le Sgen-CFDT a défendu le projet de bac modulaire, en partie porté par le rapport Mathiot, écarté par le ministère. Le bac technologique est lui contraint, sans réflexion, de se caler dans l’organisation du bac général sans prendre en compte ses spécificités d’examen, contrôle des connaissances fondées sur le projet réalisé par les élèves.

Ne parlons pas des évaluations de positionnement pour lesquelles médias et usagers ont eu davantage d’informations que ceux en charge de les organiser. Sur le fond, le travail déjà opéré entre école/collège et lycée sur les compétences peut-il encore être considéré comme légitime ?  Qui peut croire que les enseignants utiliseront et le positionnement et le LSU ?

Parcoursup : Le Sgen-CFDT a soutenu la loi Orientation et Réussite Étudiant parce que de nouveaux droits sont ouverts (régime général de sécurité sociale, contribution vie étudiante, césure possible en 1ère année…), parce que l’université peut proposer dans le cadre des « OUI SI » des parcours adaptés aux besoins différents des étudiants, parce qu’on a supprimé le tirage au sort, parce que le Bac reste la seule condition pour suivre des études supérieures.

Parcoursup et vacances scolaires : Nous ne reviendrons pas sur les conséquences de ce dispositif sur les conditions de travail des personnels de direction mais :

Ne nous cachons pas derrière de faux-semblants, si PARCOURSUP a pu opérer son déroulé pendant l’année scolaire 2017/2018, c’est essentiellement grâce une fois de encore au total engagement des proviseurs et proviseurs adjoints et de leurs collaborateurs directs. Quelle reconnaissance ? Aucune, au contraire il nous est demandé toujours plus et de faire face au comportement bien souvent agressif des usagers. Parcoursup demandant d’indiquer les 3 semaines de fermeture des EPLE est un déni du travail des personnels de direction et une méconnaissance du fonctionnement des lycées.  Il convient de reconnaître de façon concrète et significative le travail supplémentaire effectué par les personnels de direction, y compris financièrement, y compris par l’ouverture d’un compte épargne temps.

Les propositions formulées par le Sgen-CFDT pour cette année :

  • Que le plus grand nombre de bachelier·es soient affecté·es dans les formations d’enseignement supérieur demandées avant le 14 juillet ;
  • Libérer d’obligations de jury et de correction d’examens et concours celles et ceux qui doivent traiter les dossiers de STS et CPGE arrivant début juillet dans les établissements ;
  • Suspendre, dans les EPLE, la procédure Parcoursup pendant la période de fermeture administrative des EPLE ;

Pour l’an prochain :

  • Faire un bilan partagé du déroulé de Parcoursup dès la fin de la phase complémentaire (en relation avec le comité éthique et scientifique de Parcoursup) ;
  • Engager une véritable concertation pour faire évoluer Parcoursup en fonction de l’évaluation qui aura été effectuée ;
    Accélérer la procédure d’affectation des élèves ;
  • Définir un calendrier qui prenne en compte la réalité des EPLE.

L’évaluation des agents dans le cadre du PPCR  

Les inspecteurs et les personnels de direction n’ont pas bénéficié des formations nécessaires à une vraie évolution de l’évaluation, remplacée par une simple formation technique.

Où est l’autonomie que nous promettait le ministre à son arrivée rue de Grenelle ?

Si un rapport concernant la gouvernance territoriale et la fusion des académies a été publié très rapidement au mois de mai dernier, aucune réflexion, à notre connaissance, n’a été ouverte sur l’autonomie des EPLE.

Pour le Sgen-CFDT, l’autonomie des EPLE repose sur des objectifs énoncés par l’échelon central et non des prescriptions qui se matérialisent par des programmes non-curriculaires, par le pouvoir d’agir donné aux équipes et par une évaluation des établissements et non des individus. L’autonomie, c’est pour l’établissement d’être en capacité de répondre aux spécificités des élèves accueillis, pas de recruter ses personnels et de mettre les établissements en concurrence.

Monsieur le Recteur, permettez-nous d’évoquer quelques points relevant plus précisément de notre académie.

Nous souhaitons que dans le cadre de la réforme du baccalauréat, de vraies réunions de réflexions et de mutualisations soient mises en place sur le territoire, car les personnels de directions sont les acteurs de terrains. Quant aux circulaires, nous les lisons tous en amont des réunions. Mais nous vous remercions, monsieur le recteur d’avoir devancé nos vœux par vos annonces.

Nous demandons que dans l’académie de Nice, les courriers officiels que nous adressons au cabinet fassent l’objet d’une réponse, écrite ne serait-ce que par le chef de service concerné. Nous sommes désolés de souligner que c’est la seule académie où les chefs d’établissement n’ont pas de réponse pour des courriers officiels.

Enfin, sans remettre en cause les contraintes réelles qui pèsent sur les services, nous souhaitons qu’une réflexion importante soit menée sur l’organisation des examens (bac ou BTS) pour rendre le système plus efficient dès 2019, même si nous savons que la réforme nous conduira de toute façon à le faire.

Conclusion :

Nous sommes des cadres loyaux et responsables, nous ferons le travail que nous commande notre institution tout en faisant entendre notre voix. Pour le Sgen-CFDT, les directions prises par notre ministère ne nous semblent pas être les bonnes pour favoriser la réussite de tous les élèves et permettre plus de justice scolaire et sociale. Nous appelons à une politique favorable à la réussite de chaque élève et porteuse de plus de justice scolaire et donc à plus de justice sociale.

La méthode utilisée ne nous semble pas non plus respectueuse du professionnalisme des cadres pédagogiques, inspecteurs et personnels de direction. Les personnels de direction sont assignés à des rôles d’opérateurs et les inspecteurs à des missions de contrôle.

Voulons-nous une école fondée sur l’intelligence et l’autonomie de ses acteurs et de ses cadres ou une école où notre seul rôle serait de relayer la parole institutionnelle et d’appliquer les prescriptions énoncées par le ministre ?

De l’inquiétude nous sommes passés au mécontentement, du mécontentement à la colère. Notre ministère ne doit pas sous-estimer l’état d’esprit actuel des personnels dirigeants des EPLE qui pendant tant d’années ont été d’une loyauté absolue pour accomplir les réformes voulues par la nation et qui aujourd’hui  se sentent peu soutenus et peu considérés par l’ETAT. Le burn-out et la souffrance au travail sont aujourd’hui une réalité qui frappe aussi nos professions.  L’école de la confiance pour la réussite de tous doit passer par la confiance mutuelle avec les cadres chargés de la mettre en place.