Lancement d’un parcours de licence en IUT

Cursus licence en IUT : une analyse du Sgen-CFDT.

Lancement d’un parcours de licence en IUTNouveau parcours en IUT : lier un DUT et une Licence pro

« Nous allons créer un cursus licence en IUT » a annoncé en avril 2017 Rodolphe Dalle, porte-parole de l’Assemblée des Directeurs d’IUT – ADIUT, dans un entretien au journal Le Monde (édition du 17 avril).
En pratique, il s’agit de lier un DUT et une Licence pro : autrement dit, les étudiant.es pourront poursuivre automatiquement en licence pro (Lpro) , sans subir une nouvelle sélection entre le DUT et la Lpro, tout en permettant à celles et ceux qui le souhaitent de s’arrêter au DUT.

En soi, cette proposition tend à rapprocher le parcours en 2 ans du DUT du schéma du LMD, qui définit des sorties à bac +3, bac +5 ou bac +8.

Proposer un tel cursus est donc logique et on pourrait presque s’étonner qu’il ait fallu autant de temps pour y arriver – d’autant que dans les faits une grande proportion d’étudiant.es obtenant le DUT poursuivent leurs études par une LPro.

 

Recrutement diversifié, reconnaissance de l’engagement étudiant et accompagnement personnalisé

Outre l’absence de sélection entre le DUT et la Lpro, les IUT annoncent un recrutement diversifié, la reconnaissance de l’engagement étudiant, l’accompagnement personnalisé, une pédagogie interactive, la consolidation de l’expérience professionnelle, et une ouverture à l’international.

Le renforcement de la professionnalisation pourrait correspondre à une meilleure répartition sur les 3 ans des travaux personnels, et corrélativement, les étudiants auraient moins d’heures en présentiel, afin de pouvoir mener à bien les projets. Cet aménagement pourrait par ailleurs constituer une première étape vers la possibilité pour les IUT de délivrer une « véritable » licence, projet qu’ils défendent depuis longtemps.

D’autres diplômes sont en train de suivre la même évolution…

Cette « refondation » des formations au sein des IUT n’est pas un problème en tant que tel mais ce qui compte, au-delà des intérêts des uns et des autres, c’est la capacité de la globalité du système à répondre aux besoins collectifs.

D’autres diplômes sont en train de suivre la même évolution : les formations du design et des métiers d’art, actuellement basées sur des BTS auxquels s’ajoutent un diplôme spécifique, vont bientôt avoir un grade de licence (diplôme national des métiers d’art et du design), et seront désormais totalement intégrées au schéma du LMD, sur la base d’un arrêté qui n’est pas sans rappeler justement celui de la licence (ce qui est logique, puisque ce diplôme donnera le grade correspondant).

 

Évolution de la structure du premier cycle de l’enseignement post-bac

Ainsi, c’est globalement la structure du 1° cycle de l’enseignement post-bac qui est en train d’évoluer. Que cette évolution se fasse par étape, c’est assez naturel, parce que tout modifier en même temps serait pratiquement ingérable. Mais ne pas s’interroger sur la globalité des formations, sur leur place dans le post-bac et ce qu’elles offrent, c’est courir le risque d’un schéma final incohérent, qui ignorerait les besoins d’un nombre important de lycéennes et lycéens.

 

Concevoir l’arborescence des formations, pour que les étudiant.es ne se retrouvent pas dans des filières où leur taux de réussite est très faible…

Pour ne laisser personne au bord de la route, il faudrait avoir à chaque étape, à chaque sortie, à la fois de véritables possibilités d’emploi et de véritables possibilités de poursuite d’études…

C’est de cette manière qu’il faut concevoir l’arborescence des formations, pour que les étudiant.es ne se retrouvent pas dans des filières où leur taux de réussite est très faible : un peu plus de 5% seulement des bacs pros réussissent leur licence en 4 ans alors qu’ils sont 48% à réussir leur BTS en 3 ans (dans les 2 cas, une année supplémentaire par rapport au cursus prévu).

À noter que les statistiques de réussite pour les BTS sont en général présentées en termes de réussite à l’examen, et non en termes d’inscrits… ce qui revient à occulter le phénomène du décrochage (voir L’état de l’enseignement supérieur et de la recherche, n° 4, décembre 2010, Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche).  En parallèle, les bacs généraux ont réussi leur licence en 4 ans à 49,2%. (Voir à ce sujet Parcours et réussite aux diplômes universitaire : les indicateurs de la session 2015, Note Flash n°15, novembre 2016, Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.)

Donner aux étudiant·e·s les moyens d’acquérir les compétences nécessaires et ne pas leur mentir sur ce qui les attend…

Laisser un.e étudiant.e aller échouer dans une filière parce qu’il n’a pas les pré-requis, sans lui donner les moyens d’acquérir les compétences nécessaires pour réussir, n’est pas lui rendre service. Accepter les bacs pros en licence générale, sans s’assurer qu’il leur est possible de réussir, après les avoir refusé en BTS, parce qu’ils n’avaient pas un niveau satisfaisant, c’est leur mentir sur ce qui les attend.

 

Clarifier le paysage du premier cycle de l’enseignement supérieur, au bénéfice de la réussite des étudiant·e·s…

Ne serait-il pas plus logique de considérer qu’ un.e étudiant.e doit être inscrit.e là où il a des chances de réussir ? Et de prévoir des passerelles entre les formations, pour ouvrir la porte à des parcours moins linéaire ? Le rapport Lerminiaux proposait par exemple de permettre à des étudiant.es de L1 de suivre des enseignements de BTS ou de DUT et réciproquement. On pourrait envisager également des remises à niveaux, des accompagnements personnalisés… pour que celles et ceux qui souhaitent poursuivre en licence générale aient les moyens de réussir. Mais cessons de les expédier par défaut là où ils ont toutes les chances d’échouer !

Une réflexion qui va bien au-delà de la rénovation des parcours en IUT

Cette réflexion va évidemment bien au delà de la rénovation des parcours en IUT annoncés par l’ADIUT – rénovation qui constituerait un progrès indéniable pour les étudiant.es, en évitant une sélection supplémentaire au milieu d’un cycle.

C’est toutefois l’occasion de rappeler qu’il serait urgent de clarifier le paysage du premier cycle de l’enseignement supérieur, au bénéfice de la réussite des étudiant.es. Ne l’oublions pas : les institutions ne se justifient que par le service qu’elles rendent à la collectivité.