Respirez… vous êtes au Sgen-CFDT

Boîte à outils pour reprendre immédiatement le contrôle de ses émotions.

Si éduquer n’est pas impossible, comme le mot plaisant de Freud a pu le laisser croire en son temps, parfois, en tant qu’enseignant nous devenons tout de même quelque peu dubitatif. Enseigner est un métier éminemment technique.
Puiser au fond de ses ressources psychiques et psychiques pour relever le défi de la transmission crée des tensions. Elles sont nécessaires et utiles pour aider à penser mais elles ne se dissipent pas toujours aisément. Accumulées et agglomérées entre elles, elles peuvent devenir chroniques et toxiques et leur pouvoir de nuisance ne doit pas être sous estimé.

La fréquentation des salles des maîtres comme des conseils syndicaux apprend qu’il s’y dit parfois des choses qu’il serait prudent de ne pas répéter hors d’un cercle d’initiés. Ce découragement, cette déception, cette inquiétude et cette peur, ces sentiments d’impuissance, de trahison ou encore de désemparement voire de colère – cochez ce que vous reconnaissez – peuvent paraître impossibles à dépasser définitivement et globalement.
Et c’est le cas. Ils ne le sont pas.
Il n’est pas possible de les dépasser entièrement une fois pour toutes. Ces émotions font partie de nous et nous vivons avec.
Mais d’une part, c’est sans importance car il est possible de ne plus en ressentir les effets. Et au fond, c’est bien la seule chose qui nous intéresse – ceux qui veulent aller s’allonger sur un divan pendant huit ans peuvent baisser la main.
Et d’autre part, nous faisons l’hypothèse que les caractéristiques de notre respiration contribuent de façon décisive à nous faire perdre le contrôle de nos émotions.

Alors, comment ne plus être envahi par des sentiments négatifs?

Par la conjonction d’une opération mentale simple et d’un geste physique banal. En prenant conscience d’une part que ce que nous ressentons est évitable et en respirant calmement et profondément d’autre part. C’est le silence créé par le second geste qui permettra de faire le premier.
Pendant un instant, on cesse de réagir à notre environnement et on agit.
On crée un espace dans lequel on ne répond plus.
On agit et on reprend la main.

Cela paraît un peu trop beau pour être vrai. Et pour autant il ne s’agit pas de répéter des billevesées de gourou de table de cuisine mais de faire une brève exploration du lien entre l’intensité de l’émotion d’une part, et l’amplitude et la fréquence de la respiration d’autre part.
Selon un article paru dans Science, nous sommes en passe de prouver ce que les pratiquants du pranayama yoga avancent de façon empirique: que le contrôle de la respiration influe sur l’état de conscience et que l’air que nous respirons est notre première nourriture. Une mesure rigoureuse de la quantité d’oxygène consommée quotidiennement tend à confirmer cette intuition (note 1).

Comment ça marche?

L’air que nous respirons est composé d’à peu près 21% d’oxygène, le reste étant essentiellement du CO2. Du remplissage, en quelque sorte.
L’enjeu est de garder un bon équilibre entre les taux d’oxygène et les taux de CO2. Si un des deux existe en trop forte ou en trop faible quantité, la liste des symptômes s’allonge rapidement (note 2). Tout est question de proportion et il est utile de se rappeler que nous avons affaire à des gaz qui sont en perpétuel mouvement et dont les actions sont quasi instantanées.

Ainsi, lors d’une respiration trop superficielle ou trop rapide – chose commune en situation de stress – notre taux relatif de CO2 augmente.
Notre corps le perçoit et le traduit par un manque d’oxygène. Il va donc accélérer la respiration pour tenter d’en amener.
Cela peut marcher. Ou pas.
Quand ça ne fonctionne pas et que la proportion de CO2 continue à augmenter, le corps va demander toujours d’avantage d’oxygène en inspirant plus profondément et plus longuement. Au détriment de l’expiration… Et c’est là qu’un mécanisme néfaste se met en place.
L’évacuation du CO2 ne pouvant s’effectuer parce que les expirations se font trop courtes et trop superficielles, le taux de CO2 augmente encore. On commence à ressentir une sensation d’essoufflement voire d’étouffement. Qui à son tour accélère la respiration et la rend encore plus superficielle. Et inefficace.

Alors, comment éviter que ce piège s’ouvre?

Tout commence par une habitude à acquérir, qui consiste à observer sa respiration.
Et dès qu’on la constate trop rapide ou trop ample, on s’arrête et on se force à expirer très profondément et lentement par le nez pour faire baisser le taux de CO2. Dès la première inspiration suivante l’afflux massif d’oxygène contribue à revenir à l’équilibre. Cela signifie très concrètement qu’en un seul cycle respiratoire, nous pouvons commencer à retrouver notre sang froid. Il est très important d’observer qu’il s’agit d’un réflexe à construire car instinctivement notre corps régit mal. Parfois la nature est mal faite.

D’une manière générale, une respiration diaphragmatique (note 3) lente est bénéfique car elle fait parvenir l’air inspiré dans la partie basse des poumons et que les alvéoles de cette zone – contrairement à celles qui se trouvent dans le haut des poumons – sont entourées d’un réseau dense de capillaires, ce qui permet à l’oxygène contenu dans l’air respiré de passer des poumons au sang en plus grandes quantités.
C’est d’autant plus important qu’à long terme une respiration trop superficielle entraîne une modification de l’équilibre acido basique du corps, qui a des répercussions importantes sur la santé

Si le principe de base est simplissime, son exécution maîtrisée est faussement simple. L’acquisition de ce savoir faire nécessite un minimum d’entraînement.
Vous pourrez vous former en autodidacte en glanant des informations mais il paraît souhaitable de suivre quelques cours pour acquérir des techniques de base et commencer à repenser sa respiration.

1. Un litre d’air sec au niveau de la mer pèse 1,2 g. Nous en respirons en moyenne 12 000 litres par jour, soit 14,4 kg. Cela renforce l’idée qu’il importe de bien s’en nourrir.
2. L’hyperoxie: excès d’oxygène dans le sang. Elle est due à un excès d’apport en oxygène en secours d’urgence, en réanimation médicale ou en plongée sous marine avec gaz enrichis. Elle ne peut pas être provoquée par l’hyperventilation.
L’hypoxémie: manque d’oxygène dans le sang. Elle peut être causée par un déficit de ventilation. Elle se manifeste par des nausées, des maux de tête, une hyperventilation, une tachycardie ou des troubles du comportement.
L’hypercapnie: excès de CO2 dans le sang. Il s’agit d’un état permanent lié à des pathologies précises comme la broncho-pneumopathie chronique obstructive, le syndrome d’obésité hypoventilation ou la maladie de Charcot. Lorsqu’elle est chronique, elle peut avoir pour conséquence des troubles du sommeil, des maux de tête et de l’anxiété.
L’hypocapnie: trop peu de CO2 dans le sang. Il est habituellement causé par une hyperventilation éliminant trop de gaz carbonique. Les effets vont des sensations de vertiges et des troubles visuels aux problèmes de concentration en passant par des maux de tête et des troubles du rythme cardiaque.
3. C’est à dire « par le ventre ».