Le choc des trois jours de carence, ou comment pénaliser les plus fragiles

L'INSEE le montre clairement : en prévoyant de passer d'un à trois jours de carence en cas d'arrêt maladie, le gouvernement s'en prend aux collègues les plus fragiles.
Il entraînera du présentéisme, un phénomène magiquement disparu du débat public.

Une enquête récente de l’INSEE, parue le 17/07/2024, analyse l’effet du « jour de carence » sur les absences pour maladie des personnels de l’Éducation nationale.

Il ressort de cette enquête que les arrêts de travail sont plus fréquents pour :

  • les femmes
  • les collègues les plus âgé.e.s
  • celles et ceux qui exercent en zone d’éducation prioritaire, et donc dans des conditions difficiles
  • les collègues appartenant à la catégorie C, qui ont les plus bas salaires.

Avec la réforme des retraites et l’allongement du temps de travail qu’elle entraîne, les arrêts de travail des plus âgé.e.s vont immanquablement augmenter.

Une mesure pénalisant les femmes

En 2020, une autre étude de l’INSEE révélait que près d’une famille sur 4 est monoparentale.
Le site egalite-femmes-hommes.gouv.fr fait de la publicité pour un ouvrage paru publié en décembre 2022 par la Fédération nationale des centres d’information sur les droits des femmes et des familles, selon lequel l’immense majorité des parents isolés sont des femmes ; elles représentent 82 % des parents isolés à la tête de familles monoparentales.
L’appauvrissement consécutif à une séparation est documenté depuis longtemps. Une étude de l’INSEE datant de 2018 montre que « lors de la séparation d’un couple sans enfant, le niveau de vie des femmes diminue de 26 % ».

Pénaliser financièrement des femmes appauvries par une séparation et qui galèrent au quotidien est inacceptable : le Sgen-CFDT ne peut que s’insurger contre ce projet.

Une mesure absurde et injuste

La plupart des fonctionnaires peuvent poser des jours de RTT lorsqu’ils sont malades ; c’est tout à fait impossible dans l’Éducation nationale.

Le projet du gouvernement va conduire à du présentéisme, défini en 2016 dans un document de la DARES (un organisme statistique ministériel chargé d’accompagner les pouvoirs publics lorsqu’une réforme se prépare (!!)) comme : « le comportement du travailleur qui, malgré des problèmes de santé physique et/ou psychologique nécessitant de s’absenter, se présente au travail » (Gosselin & Lauzier, 2011).

Le présentéisme entraîne des conséquences négatives à moyen et long terme sur l’état de santé des travailleurs. (Bergström & al., 2009), conséquences coûteuses pour la société.

Passer à trois jours de carence, c’est aggraver les inégalités, c’est une mesure contre-productive, c’est scandaleux.