Accueillir un enfant différent n’est pas anodin, et s’y préparer est nécessaire.
Construire une école inclusive ne s’improvise pas. Le maître mot est de donner des repères. Nous sommes alors dans la recherche d’une posture professionnelle adaptée et efficace.
L’enfant handicapé, allophone ou tout autre raison qui le rendrait différent est avant tout une personne, un enfant avec des besoins spécifiques. C’est aussi comme les autres jeunes, un futur adulte qui devra avoir une place dans la société.
L’école, le collège, le lycée sont des lieux symboliquement forts : quand je vais à l’école je suis comme les autres, alors que quand je vais à l’IME, à l’ITEP, à l’EREA, je vais dans une structure qui porte un nom mystérieux, je passe pour différent. J’ai une étiquette. Je dois expliquer ce qu’est ma structure d’accueil.
Comprendre pour adapter sa pratique
Quand les enfants sont petits, avant 7 ans, ils ne perçoivent pas leur différence ou la différence des autres, c’est l’adulte, le regard des adultes qui étiquette cette différence. Cet étiquetage, à condition de rester dans le champ du secret professionnel est un atout, c’est la possibilité de mettre en mots la différence. On maîtrise mieux ce que l’on nomme. C’est aussi un accès à des ressources pédagogiques, à des témoignages, à un réseau rassurant.
Notre espèce se définit comme ayant besoin de vivre en réseau social, ce qui isole nous affaiblit. Le groupe est ce qui permet à tous d’avoir une identité. L’arrivée d’un enfant handicapé à l’école est souvent une première socialisation, une première sortie du milieu familial. Pour certains enfants, ce changement est déjà un objectif en soi.
Un bouleversement pour ces enfants
Être tenu à des horaires donne un nouveau rythme de vie. Par exemple, certains aveugles qui ne perçoivent pas la lumière du jour ne se repèrent pas dans le temps, et être obligés de venir à l’école va leur apporter un nouveau rythme, bénéfique pour toute la famille.
Quitter les parents, les habitudes de vie, de communication pour être confronté à un monde normé avec des codes différents de la maison, va aussi pousser le jeune à s’adapter. Ce sera d’abord une période de stress, puis une régulation, et ensuite une fierté.
Et cette fierté est aussi très importante pour la famille, c’est une reconnaissance qui est nécessaire.
Pour arriver à cette inclusion, il va falloir ritualiser les moments d’accueil de cet enfant, accorder une attention particulière à l’entrée en classe — cela devrait être aussi le cas pour tous les enfants d’ailleurs — et aussi à chaque déplacement dans des locaux différents. Toute nouveauté est source de curiosité et cet enfant doit faire de gros efforts pour supporter la nouveauté, pour sortir de sa zone de confort.
Le maître mot est de donner des repères. Nous sommes alors dans la recherche d’une posture professionnelle adaptée et efficace.
Jouer collectif, une nécessité
Cet accueil ne repose pas uniquement sur celui de l’adulte référent (AESH ou enseignant) mais aussi dans l’accueil par le groupe d’enfants. Retrouver des copains, partager des sourires, des gestes comme la bise du matin quand c’est possible, le mot bonjour, c’est déjà une introduction au groupe.
Les enfants handicapés, à partir du moment où ils ont la possibilité de parler, et quand ils ont la maturité nécessaire, peuvent expliquer leur handicap. Cela permet de sortir du silence qui rend invisible mais aussi de formuler explicitement ses besoins : besoin de silence, nécessité de parler face à l’enfant et à sa hauteur, importance de bien ranger sacs et manteaux pour ne pas encombrer les voies de passage…
Connaître l’enfant et préparer son accueil
En amont, un travail entre l’enseignant, les parents, l’AESH et les professionnels est primordial. Il est utile de prévoir une réunion de rentrée avec tous ces partenaires pour caler les emplois du temps, poser les questions, même si elles paraissent naïves, pour que, matériellement, la fluidité et le contrôle du temps et de l’espace, et la communication se mettent en place.
Cette réunion devrait idéalement avoir lieu en juin, mais les services de soins ne sont pas toujours calés avant la rentrée car ils travaillent aussi avec les élèves dans d’autres établissements.
Avant sa première rentrée dans l’établissement, faire visiter l’école ou l’établissement hors temps de fréquentation dans une relation plus personnelle avec l’enfant permet une première prise de contact qui fera certainement tomber quelques préjugés et frayeurs irrationnelles.
Prévoir le matériel et adapter l’environnement
Si, bien souvent, on pense à demander ordinateurs, machine Perkins, plage braille, rideaux, rampes d’accès, on oublie les consommables : papier spécifique, rouleau d’adhésif, papier à dessin, gommettes, feutres adaptés… En effet, la MDPH est sollicitée pour les achats conséquents, au moment des équipes de suivi de la scolarisation (ESS) ou des équipes éducatives. L’Éducation nationale achète du matériel en investissement mais le tout-venant reste à la charge des établissements.
Il ne faut pas oublier non plus que les intervenants extérieurs ont besoin de locaux : chaque école devrait pouvoir aménager une salle spéciale pour l’accueil des enfants qui auront besoin d’être sortis de la classe, pour les calmer, pour leur proposer un coin de repli, pour les dédier à des apprentissages spécifiques, pour que le RASED soit rapidement en mesure de prendre en charge ses élèves ou faire ses bilans.
Bien accompagner la rentrée
En septembre, l’enseignant, avec l’aide des parents et des professionnels qui peuvent intervenir dans l’école (ergothérapeute, psychologue scolaire,…) aide à la verbalisation des craintes, des questions, des attentes de la classe. C’est un moment nécessaire de présentation, à condition toutefois de bien se mettre au niveau des enfants.
Ces interventions facilitent l’accueil de l’enfant, donnent du sens aux comportements a-normaux. Cela peut aider le groupe à comprendre les troubles qui perturbent la vie de la classe ou les attentions particulières qui seront parfois nécessaires. Cela permet de développer l’empathie et d’expliquer certains aménagements dans la classe : coin doudou, coin de travail aménagé, niveau sonore, contacts physiques, place dans la classe…
L’école inclusive se construit, elle ne s’improvise pas.
Quelques ressources
Deux protocoles de crise (docs pdf)
Des sites
- Un « padlet » de l’ASH Haute-Vienne, bourré de ressources (il faut faire glisser la barre, en bas, vers la droite).
- « Cap école inclusive » : des outils pour accompagner tous les élèves.
- Comprendre les troubles spécifiques des apprentissages (dys et TDA-TDAH) sur le site de l’Inserm.
- Des ressources pédagogiques sur le site « Canal autisme ».
- Un quizz sur le thème de « qui fait quoi ».
Des vidéos
- Le cerveau dans la main : gestion des émotions.
- Mon petit frère de la lune ou comment trouver le petit « truc » qui permettra à l’enfant autiste de nous autoriser dans sa bulle et peut-être de l’emmener un peu avec nous vers la nôtre.
- Courtes capsules vidéo de partage de vécu d’accompagnement d’enfants avec troubles de comportement par le CQJDC (Comité Québécois pour les Jeunes en Difficulté de Comportement).
- Une chaîne Youtube pour l’autoformation des AESH, par la DSDEN du Rhône.
- Une conférence de Grégoire Cochetel pour Canopé : AESH-Enseignant, collaborer dans une école inclusive.
- Une conférence d’Hervé Benoît, organisée par l’académie de Besançon, « pour une école riche de tous ses élèves ».
Rédigé à partir de l’article de Mathilde Micard, sur « ressources Sgen-CFDT ».